Wednesday, August 26, 2015

Partir

Nous sommes partis.
Qui sommes nous à présent ?
D'où sommes nous ?

Pour la première fois, on nous a dit :
"D'où venez vous ?"
"De France"
"Fraiince ? On connaît pas ?...
Et quelle langue vous parlez là-bas ?"
"Le français"
On a bien compris que le gars n'était pas plus avancé.

A l'inverse,  la famille et les amis de Métropole nous demandent souvent.
"Mais vous êtes où là ?"
"Trinidad ???
Ben , C'est où ???
Vous parlez quoi là bas ?
Et vous mangez quoi ?"

Alors un soir de rêverie sous un ciel scintillant de milles et une étoiles,  nous avons trouvé notre "statut" ... et philosophé un peu sur notre vie.

Il y a bien des DOM, TOM, POM.
Nous ne sommes ni un département, ni un territoire, encore moins un pays.
Alors quoi ?
Juste un BOM : un bateau d'outre mer français, notre mini république. Une catégorie bien à part.
Un peu incomprise par certains, adulée par d'autres mais hors norme... en marge.
Et pourtant ...
Nous ne sommes ni des SDF, ni des nomades. Nous sommes juste des français en mode "voyage", fiers de notre nationalité qui est aussi celle du bateau d'ailleurs.
Ce voyage n'est pas une fuite. Nous respectons et aimons les valeurs républicaines et laïques françaises. Nous avons simplement besoin de nous épanouir ailleurs, loin des standards métropolitains et de la routine prosaïque des existences terriennes.

Nous n'en detestons pas la France pour autant. Il est même amusant de voir l'intérêt que les français en voyage portent à leur 14 juillet.  Grand pavois hissé,  soirée organisée avec les bateaux copains bleu blanc rouge.  Jamais dans notre vie de terrien nous n'avions célébré notre fête nationale. Au mieux, on attendait ce jour voire ce pont comme le messie pour vite filer faire un tour en mer et observer les feux d'artifice sur la côte vermeille. Jamais le pavillon tricolore n'avait fait parti de notre quotidien et representé autant pour nous.

L'éloignement n'enlève rien à l'attachement que l'on porte à notre pays et aux notres. Mais devons nous tous vivre, ou survivre, les uns à côté des autres pour s' apprécier ?
Faudrait-il justement prendre un peu de distance pour pouvoir apprécier son joli pays ?
La liberté a un prix.

Le voyage aide à comprendre que depuis notre naissance notre vie est comme guidée sous pilote automatique. Tout est tracé pour vous par avance...surtout si vous voulez être "Normal".
Le pilote auto, à présent, s' appelle Nestor by Raymarine et c'est nous qui le commandons.
Croyez nous, il faut beaucoup de courage pour faire dévier le tracé initialement prévu mais cela vaut le coup.
Le premier pas est certainement le plus difficile : Partir.  Ensuite tout s' enchaîne.  On apprend à se défaire des préceptes et principes inculqués depuis notre enfance.  Nos cerveaux formatés par l'école puis par la vie professionnelle en viennent à être perdus voire à générer un sentiment de culpabilité dès que l'originalité ou la créativité apparaissent dans nos vies. Et pourquoi devriont nous être tous stéréotypés ? Petit à petit, on s'aventure, on essaye, on vit !

La consommation est un acte de désespoir. Nous passons des années à croire qu'il s' agit de la façon "normale " d'exister. J'ai donc je suis. Consommer est la grande activité culturelle de notre époque et de notre civilisation. Cela en dit long sur le vide sidéral de la vie moderne.
Aujourd'hui, nous consommons bien sûr mais le curseur est nettement plus bas : proportionnellement à nos moyens limités tout d'abord mais aussi car on a perdu le goût et l'ex-plaisir des achats futiles. Nous vivons et consommons utile au rythme de nos escales tout en fuyant justement celles où le niveau de vie imposé ne nous convient pas.

Oui mais et la santé ?
A l'exception de quelques accessoires de bobologie, nous n'avons pas touché au méga stock de médocs emportés au départ.  Finies la grippe "normale" et la gastro "normale" annoncées même en préventif au journal de 20 heures. On nous effraye avec les virus et autres médecines exotiques mais il n'en est rien.

Le bateau parfait n'existe pas (quoique le notre n'est pas mal du tout ;-) ).
N'attendez pas d'être "prêts" pour partir, vous et/ou vos proches ne le seront jamais.


Aujourd’hui, ceux qui ont de l’argent n’ont pas de temps, et ceux qui ont du temps n’ont pas d’argent.
Cependant, si on a l'envie et que l'on prend le temps, on n'a plus besoin de tout cet argent.
On te fait croire que le temps coûte cher... En fait, il est gratuit ! Pars !

Nous avons trouvé notre équilibre sur notre BOM à l'ombre de notre bôme.
Une chose est certaine : si c'était à refaire, on referait exactement pareil !! C'est bon d'en être à cette conclusion après 17 mois à bord.

"Exigez la liberté comme un droit, soyez ce que vous voulez être"
Richard Bach

À plusieurs reprises,  nous avons cité dans ce blog ce titre de nos amis du groupe MP 1point 2 : Partir.
Ecoutez cela résume tellement bien.


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